L’ARCEP a diffusé son premier rapport sur la qualité de service des FAI français. Ce premier observatoire distingue en particulier Bouygues et Numericable, tandis que Free obtient des scores généralement en dessous de ses rivaux. Mais si ce premier document permet d’avoir une photographie de la situation des opérateurs, sa méthodologie est parfois discutable.
Mieux vaut tard que jamais. Attendu depuis plusieurs mois, le rapport de l’ARCEP (.pdf) sur les indicateurs de performance des fournisseurs d’accès à Internet français a finalement été publié ce mardi, un mois après la date prévue. Encore incomplet (l’ARCEP le présente comme une version-test (bêta)), ce document doit notamment permettre de vérifier si les opérateurs brident les connexions.
Comme pour se prémunir des éventuelles critiques qui pourraient surgir suite à la lecture du rapport, l’autorité de régulation des communications électroniques et des postes a publié dès la première page un avertissement invitant « le lecteur à la prudence quant à l’interprétation des données » et soulignant la nécessité de publier les mises en garde méthodologiques pour la compréhension des résultats.
Long de 45 pages, le rapport s’est penché sur la qualité de service des cinq principaux fournisseurs d’accès à Internet (Orange, SFR, Bouygues Telecom, Free, Numericable) à travers sept indicateurs, sélectionnés suite à la décision (.pdf) prise début 2013. Quatre d’entre eux sont des indicateurs techniques, tandis que les trois derniers sont des indicateurs d’usage :
- Le débit descendant (download) ;
- Le débit montant (upload) ;
- Le niveau de perte des paquets.
- Le temps de latence ;
- La qualité de visionnage de vidéos en ligne d’après un panel de plateformes présélectionnées ;
- La vitesse de téléchargement en P2P ;
- Le temps moyen de chargement de pages web mesuré à partir d’un panel de sites préalablement sélectionnés ;
Il ressort de ce rapport que Bouygues Telecom obtient en général les meilleurs résultats, même s’il est parfois talonné ou rattrapé par Orange et SFR. L’avance de Bouygues se remarque en particulier dans la navigation web, la lecture de vidéos en streaming, la disponibilité de la ligne ou le téléchargement réalisé en peer-to-peer (P2P).
Concernant SFR, l’opérateur obtient des résultats assez médiocres dans la navigation web et le téléchargement en P2P, arrivant parfois dernier (sauf en fibre optique). Pour les autres critères, le FAI est globalement au niveau de la concurrence, bien qu’il montre quelques signes de faiblesse du côté de l’ADSL (lignes courtes et longues), notamment en termes de latence et de disponibilité.
Du côté d’Orange, les résultats concernant la qualité de la ligne ADSL sont similaires à ceux obtenus par Bouygues sauf dans le cas de la disponibilité, qui est franchement en recul. Orange obtient aussi de bons scores dans la navigation web et la lecture de vidéos en streaming, rivalisant notamment avec SFR. Sur le téléchargement en P2P, Orange est dans la moyenne.
Free obtient globalement les plus mauvaises notes, en particulier dans la navigation web et la lecture de vidéos en streaming, avec des écarts parfois saisissants avec la concurrence. Free est très bas dans la fluidité, le nombre et le temps de rupture, L’écart est moins net sur la disponibilité et la latence, même s’il demeure dernier. En revanche, Free obtient de très bons scores concernant le P2P.
Enfin, Numericable, du fait de la technologie employée, est analysé à part. Il ressort néanmoins que le câblo-opérateur obtient des scores équivalents, sinon supérieurs à Bouygues Telecom dans toutes les catégories de test.
Bien que l’ARCEP ait prévenu en préambule de l’imperfection de son rapport, celui-ci ne peut échapper aux critiques. En particulier, la qualité du rapport peut être questionnée dans la mesure où le prestataire a été choisi et payé par les opérateurs eux-mêmes. Ce n’est certes pas une surprise (l’information était connue depuis 2013), mais elle jette un voile sur les résultats et les conclusions.
« Les opérateurs ont choisi, avec l’approbation du comité technique, de confier la mise en œuvre du dispositif à la société ip-label . Le coût du dispositif est entièrement supporté par les opérateurs« , écrit ainsi l’ARCEP, qui a simplement demandé un « déclaration du chiffre d’affaires réalisé avec les opérateurs concernés par le dispositif » pour contrôler son indépendance.
D’autres aspects de la méthodologie sont discutables, par exemple le choix des sites mesurés qui ne paraissent pas représentatifs des usages des internautes français tandis que d’autres semblent l’être davantage. Ainsi, France Télévisions serait un « site non représentatif des usages web« , tandis que Le Monde, Allociné ou le Huffington Post auraient une « audience trop faible« .
En revanche, le rapport prend en compte des plateformes dont la fréquentation en France n’est pas nécessairement exceptionnelle. Du côté du streaming, on retrouve bien entendu YouTube et Dailymotion, deux services très fréquentés par les internautes. En revanche, l’on est davantage surpris concernant Vimeo et Metacafe, qui semblent davantage tournés vers un public américain.
Il n’en demeure pas moins que ce travail destiné à mesurer qualitativement les services fournis par les fournisseurs d’accès à Internet est très intéressant et permet de pointer les faiblesses des opérateurs dans certains domaines. D’autres rapports de ce type permettront de suivre l’évolution des FAI dans le temps, mais les doutes sur certains pans de la méthodologie devront être levés entretemps.
Source : Numerama